« La » Calvi est de retour en Rhône-Alpes. Après deux passages remarqués il y a déjà 6 ans (l’Epicerie Moderne de Feyzin et le Transbordeur de Villeurbanne), elle était attendue au Radiant de Caluire pour présenter « Hunter » son (excellent) 3ème album. Relocalisée dans la petite salle du Ninkasi Kao de Gerland (vacances de Toussaint oblige ?), elle a éclaboussé de son talent les quelques 600 spectateurs – du vingtenaire au quinquagénaire – venus l’écouter religieusement pendant un (trop) court set de 1 heure 20.

Nous passerons sur la première partie, un « DJ set » assuré par Pratos, dont l’attitude arrogante a vite braqué un public venu voir de vrais musiciens et non des pousseurs de boutons.

Accompagné d’un batteur et d’une claviériste-percussionniste-guitariste, la longiligne britannique – corsage rouge vif et pantalon noir – attaque avec Rider to the Sea, seule avec sa guitare Fender. L’ambiance est atmosphérique, les notes s’égrènent avec lenteur et minutie. Dommage que la sonorisation vacillante ait transformé les 2 ou 3 premiers titres en une bouillie difficilement supportable. Quoi qu’il en soit, le public aura droit à 7 (sur 10) chansons extraites de « Hunter » interprétés magistralement : Anna alterne le chant le plus cristallin (Away, No more words, Swimming pool) avec la sauvagerie la plus crasse (Wish), tout en conservant une parfaite maîtrise de son instrument.

Derrière son apparence de jeune fille sage, Anna Calvi peut se muer en une diablesse provoquant stupeurs et tremblements

Avant la parution de « Hunter », Anna avait tweeté : « Je voulais de la simplicité, je voulais quelque chose de calmement courageux, calmement rebelle. Je voulais qu’il y ait de l’intimité. Je voulais trouver un endroit entre la beauté et la laideur (…) « Hunter » consiste à explorer son plaisir de toutes les manières possibles, libéré de toute honte. Il s’agit de trouver un espace sûr où cela est accepté et soutenu ». « Anna Calvi assume son identité queer dans un album qui explore le genre » lisait-on dans Cheek magazine en juin dernier. Par-delà le propos, elle disait vouloir ne pas être étiquetée. Plus discrètement que Chris(tine and the queens), la Calvi démontre surtout que, derrière son apparence de jeune fille sage, elle peut se muer en une diablesse provoquant stupeurs et tremblements, sans avoir besoin de lever un poing revendicatif. Le public l’observe, médusé, tellement abasourdi qu’il manifeste peu son appréciation.

La petite scène du Kao limite ses déplacements ? Qu’importe, chacun de ses pas semble préparé, calculé. Soudain, la voilà courbée en deux après un riff furieux sur Don’t beat the girl out of my boy, son récent tube. Seulement une douzaine de titres, mais intenses et joués de façon incandescente. Anna choisit ses gestes, son « body language » est félin et son visage, comme désincarné de son corps, pointe vers le sommet du Kao. On aurait aimé un peu plus de communication avec le public. Sa guitare semble lui bruler les doigts. Elle la repousse sur ses hanches, s’en ressaisit pour mieux la martyriser à l’aide d’un bottleneck (Indies Or Paradise). Sur Wish, elle se mue en cowgirl, prête à fusiller les spectateurs-indiens avec sa Fender-carabine. Quant au rappel, la reprise de Suicide (Ghostrider) mettra tout le monde d’accord.

Setlist : 1. Rider to the Sea 2. Indies Or Paradise 3. As A Man 4. Hunter 5. Don’t Beat The Girl Out Of My Boy 6. I’ll Be Your Man 7. Alpha 8. No More Words 9. Swimming Pool 10. Suzanne and I 11. Desire 12. Wish 13. Ghost Rider

Compte-rendu, photos et video Patrick DUCHER

 

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