Jack White était de passage aux Nuits de Fourvière le 8 juillet dernier. C’était probablement LE concert de l’année du moins sur le papier… Patrick Ducher y était. Il n’a pas été totalement convaincu. Récit
Voilà un type qui, avec son groupe les White Stripes, a renouvelé le genre du blues-rock – en compagnie de ses collègues Black Keys et autres Strokes de 1999 à 2007. La dextérité dont il fait preuve lorsqu’il manie sa guitare est stupéfiante. A moins de 40 ans, il a été adoubé par des légendes de l’instrument – rien de moins que Jimmy Page (Led Zeppelin) et The Edge (U2) – dans le documentaire It might get loud (2008). Et qui peut se targuer d’avoir créé un méga tube (Seven Nation Army et son riff imparable) entonné dans des stades entiers ?
Le théâtre romain était plein comme un oeuf – plus de 4.000 personnes – pour accueillir en première partie They call me Rico, un chanteur canadien accompagné de sa seule guitare et d’une micro-batterie. Le temps de 5 petits morceaux – dont une reprise de Whole Lotta Love au dobro – Rico est ovationné mais nous laisse un peu sur notre faim au bout de 30 minutes. Sa voix rauque à la Bob Seger a assurément de quoi plaire. A l’arrière de la scène, des instruments sont dissimulés par de grande bâches en plastique (vous savez, comme les meubles chez votre mémé quand elle faisait la poussière). Des roadies en costumes sombres et cravates bleues se pressent pour les disposer et les accorder pendant un long moment. Puis un minuteur apparaît sur un écran. Surprise, les spectateurs médusés découvrent Jack White qui fait accélérer le décompte avant l’entrée sur scène. White se servira ce soir d’une demi-douzaine de guitares rutilantes. Il est accompagné d’une batteuse, d’un bassiste et de deux claviéristes. La scénographie est magnifique. Du temps des White Stripes, le rouge était la couleur dominante. C’est désormais le bleu, puisque les jaquettes de ses 3 albums en solo publiés après l’arrêt des Stripes (Blunderbuss en 2012, Lazaretto en 2014 et le tout récent Boarding House Reach sorti en 2018) arborent tous cette teinte, peut-être un clin d’oeil rétrospectif l’album à De Stijl ? Durant les chansons, des animations souvent magnifiques sont projetées dans le fond de la scène dont on retiendra notamment Why walk a dog ?
Passons au son : gras, gros, fort et lourd. Ce sont les guitares de Jack que l’on entendra à s’en faire péter les tympans. Surtout qu’il est accompagné d’une batteuse-enclumière à la frappe binaire et rustique qui ne sera pas en reste pour nous vriller les oreilles. Les claviers furent quasi-inaudibles (dommage pour l’orgue Hammond). Quant au bassiste, il se planquait en haut de l’estrade. Reconnaissons que le natif de Detroit – et fondateur de sa propre maison de disques Third Man Records – ne se ménage pas : il joue à l’énergie, à 200 à l’heure, tout le temps, le visage mangé par une crinière de geai. Le beat est hyper-rapide et on reconnaît les fameux breaks intempestifs qui ont fait sa marque de fabrique. Le problème est que son chant est inaudible. Il a beau hurler, on ne comprend rien du tout. Il faut donc s’en remettre totalement au rythme.
Certes, on se laisse prendre par les riffs – surtout quand les guitares sonnent comme celles de Jimmy Page ou Ritchie Blackmore (Deep Purple) – mais la répétition devient vite lassante au bout des premières 45 minutes. Le passage à la guitare sèche le temps de 2-3 morceaux permet au public de reprendre son souffle (Hotel Yorba est excellent), puis on reconnaît quelques morceaux des Stripes (Fell in love with a girl, My doorbell, …). Les spectateurs – une majorité de quadras et trentenaires au look pas forcément “rock” alors qu’on aurait pu s’attendre à une armée de barbichus tatoués – semblent beaucoup apprécier, c’est le principal. Des foux furieux se font même porter à bout de bras par la foule, devant un Jack imperturbable.
Quatre titres en rappel (pour un total de 26 en presque deux heures), dont le récent single, le très nerveux Connected by love. Et vint l’orgie finale avec ZE tube mondial qui enflamme des hordes de supporters dans le monde entier. Seven Nation Army a mis tout le monde d’accord ! Quelle déception cependant de ne pas avoir entendu Icky Thump, le joyau de l’album éponyme (2007) pourtant joué la veille en Belgique. Bref, un concert “high energy “ blindé à craquer . Pourtant, j’ai le sentiment confus de m’être ennuyé. Toujours le même beat, cette orgie de notes, ces claviers inaudibles et cette batteuse. Bref, ce qui est supportable le temps d’un CD devient insupportable le temps d’un concert. Too bad…
Récit, photos et vidéo de Patrick DUCHER
Setlist: 1. Over and Over and Over 2. Dead Leaves and the Dirty Ground 3. Corporation 4. Why Walk a Dog? 5. I Think I Smell a Rat 6. Lazaretto 7. Hotel Yorba 8. Hypocritical kiss 9. Broken Boy Soldier 10. What’s Done Is Done 11. Freedom at 21 12. Respect Commander 13. I Cut Like a Buffalo 14. Hello Operator 15. Ball and Biscuit 16. Ice Station Zebra 17. Respect Commander 18. That Black Bat Licorice 19. Just One Drink 20. We’re Going to Be Friends 21. You’ve Got Her in Your Pocket 22. Steady, as She Goes Rappels: 23. I’m Slowly Turning Into You 24. Connected by Love 25. Ice Station Zebra 26. Seven Nation Army.
Un extrait du concert :