Nouveau projet du saxophoniste Lionel Martin, Palm Unit était en concert le 13 janvier au Périscope à Lyon. Notre envoyé spécial Patrick Ducher a assisté au double set. Compte rendu.

Jef Gilson (1926-2012) est un jazzman français méconnu. Et c’est bien dommage tant ses productions étaient détonnantes. Le groupe Palm Unit lui a rendu hommage, à l’initiative du producteur Antoine Rajon. Dans le magazine Citizen Jazz de décembre 2017, ce dernier expliquait que “Gilson n’était pas un ami du beau”. On est tenté de s’incrire en faux, tant la musique de Gilson a semblé couler comme de la lave en fusion devant le public ravi de la petite salle lyonnaise du Périscope.

Durant les deux “sets” d’une quarantaine de minutes, le trio Palm Unit a maintenu les spectateurs sous une pression constante. Si le rythme des 9 morceaux était sensiblement le même – un début plutôt lent – amorcé tantôt par le batteur Philippe “Pipon” Garcia (entendu avec le trompettiste Erik Truffaz), tantôt par le saxophoniste Lionel Martin (Ukandanz) – la montée en puissance inexorable prenait ensuite littéralement à la gorge.

Pas de réelle structure – on est dans le free le plus pur – ni de mélodie mais des ambiances très particulières. Certes, cette musique est exigeante et demande une attention soutenue. Mais une fois qu’on a accepté de monter à bord de la pirogue, on ne regrette pas le voyage. L’orgue de Fred Escoffier (membre du collectif Le sacre du printemps) donne une texture sonore et un liant singulier à un magma en apparence bruitiste.

Les ambiances sont à la fois psychédéliques, un peu seventies, parfois très rock (“stooggiennes” me confiait Lionel Martin pendant le break). On pense aussi aux Doors. A un moment, Garcia triture un micro et s’en sert de maillet pour frotter puis cogner sa batterie avec frénésie. Les sons caverneux et métalliques qu’il tire de son équipement s’ajoutent à la singularité de l’ensemble.

Le trio, véritable unité incandescente, semble flotter dans une bulle intemporelle. Les baguettes de Garcia claquent comme des coups de fouet, quelque peu adoucis par l’orgue d’Escoffier qui donne une sonorité globale quasi-religieuse.

Au centre de la scène, Martin souffle tel un possédé dans son sax. Il est revêtu d’une étrange tunique rouge – un costume rituel ? – et se balance d’avant en arrière comme possédé par un culte vaudou. C’est la seconde fois qu’il redonne vie à un musicien méconnu (avec son compère le pianiste Mario Stantchev, il avait célébré précédemment les compositions de Louis Moreau Gottschalk).

Sur disque, le trio est en fait un quartet avec le musicien malgache de valiha (un genre de cithare) Del Rabendja que le groupe espère bien faire venir en France pour ses prochains concerts.

Le disque Chant Inca qui rend hommage à la musique de Jef Gilson est publié chez Super Sonic Jazz. Il a été nommé disque du mois de décembre 2017 par le magazine Citizen Jazz.

Deux titres sont en écoute sur le site de l’émission “Open Jazz” d’Alex Dutilh sur France musique

Article (C) Patrick Ducher Photos : (c) Pauline Désormière

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